Il pleut.
Je marche sous la pluie, tête légèrement baissée. Le soleil a laissé sa place à la nuit. Dehors, il n'y a personne. Seulement moi.
Je n'ai pas froid et cette ambiance peu nostalgique ne me dérange pas. Disons que j'ai l'habitude. Parfois, il est vrai, cette solitude m'attriste. Il m'est interdit d'avoir des amis. Je peux faire des connaissances, mais, cela n'est que temporaire. On m'oublie par la suite. Je marque les esprits des gens sur le moment, et, ensuite, cette marque s'éfface. Je ne sais pas pourquoi. Est-ce normal ? Après tout, c'est comme ça et non autrement...

Je continue ma longue marche encore et encore.
Que vais-je bien pouvoir faire ce soir ?
Un homme âgé passe près de moi sans faire attention à ma présence. Je me retourne lentement dans l'intention de l'examiner.
Il avance à petits pas, titubant presque, en direction d'une poubelle assez large. Il sent l'alcool et ses habits miteux et mouillés laissent découvrir un personnage mis de côté vivant dans la misère. Il grelotte. Par saccades, ce pauvre vagabond attrape maladroitement la poubelle, puis, avec beaucoup de mal, il parvient à la renverser. Il l'ouvre et hésite un instant. Intrigué, je n'arrête pas de le regarder. Je l'entends qui tousse péniblement. Il souffre, je le ressens.

Soudain, cet homme prend l'initiative de farfouiller dans les déchets. Il déchire les sacs, un par un, en prenant le soin de récuperer des objets utiles à ses yeux. Mon visage devient triste, mon coeur se noue. Une bougie, voilà sa découverte. Il contemple sa trouvaille et rit de joie.

Dans un premier temps, ne sachant que faire face à cette situation, je reste cloué au sol. J'aimerais tant l'aider. J'éprouve de la pitié pour lui.

Le vagabond vide ensuite la poubelle. Je devine ce qu'il veut faire. Il a besoin d'un abri pour la nuit et contre cette pluie.
Je ne peux pas le laisser dans cet état.
Je m'approche sans le perdre du regard.

" Monsieur ! Excusez-moi ! Interpelle-je "

Il s'arrête aussitôt et sort de son refuge.

" Que me voulez-vous ? Répond-t-il.
- Je voudrais vous aider...
- Personne ne le peut ! "

Il peste, puis, se sentant dérangé, il quitte cet endroit sans oublier sa bougie. Le voyant s'éloigner, je ferme les yeux et j'apparaîs devant lui. Ce dernier sursaute.

" N'ayez pas peur, monsieur... Rassure-je.
- Que...
- Je veux simplement vous apporter mon aide. "

A ces mots, il tousse de plus belle. Je tend mon bras et ma main rentre en contact avec son coeur. Je frémis, je vois sa maladie, je la sens. Une énergie de ma part se met à se propager dans son corps. Son visage devient moins fatigué et plus jeune. Malheureusement, cela ne sera que temporaire. Pour quelques mois, déjà. J'espère que d'ici-là, il sera sortit de sa misère. Il en va pour sa santé et son bonheur.

" Mer... Merci... "

L'homme ne sait plus quoi dire, il ne trouve plus ses mots tellement qu'il se sent libéré. Il est ému, il pleure. Je souris, les yeux remplis de satisfaction. Je suis content de mon action.

Lentement, je m'éloigne de lui. A ce moment précis, je sais qu'à chaque pas que je fais, il se souvient de moins en moins de moi et de ce qu'il c'est passé. Il en est ainsi. Mais mon aide, elle, elle reste. C'est ce qui est le plus important.

Au bout d'une certaine distance, le regard du vagabond se détourne du mien. Il ne sait plus rien.
La pluie s'étant arrêtée, je baisse la tête et je continue ma longue marche encore et encore...